L'amère saveur de la naïveté (7e partie)

Publié le par Nguema Ndong

L'amère saveur de la naïveté (7e partie)


Cette fameuse nuit

Les jours et les semaines passaient et les deux tourtereaux continuaient de se voir. Certains soirs, ils allaient manger dans des restaurants ou prendre un verre ici et là. Ovono donnait parfois de l’argent à Eyui sans que cette dernière le lui demande. C’étaient des sommes dérisoires. Au départ, Eyui refusait catégoriquement ces coups de main. Mais face à l’instance d’Ovono, elle se résolut à les accepter. Ces sous lui permettaient de rendre sa vie moins bourrue. Ovono lui disait qu’il n’était pas né avec une cuillère d’argent dans la bouche. Il lui répétait que sa famille vivait dans la précarité et que certains soirs, ils n’avaient rien à manger. Ainsi, en lui venant en aide, il repensait à son enfance et à la souffrance qu’ils avaient endurée. Il ne voulait pas que tous ceux qui le croyaient connaissent la même situation. Il faisait du mieux qu’il pouvait. Eyui avait donc cédé et percevait cette aide. Cependant, elle campa sur son refus lorsque ce dernier voulut lui offrir un smartphone. Elle trouvait le cadeau trop onéreux pour l’accepter. Malgré l’insistance d’Ovono, Eyui ne céda point. Par ailleurs, ils n’avaient plus eu l’occasion de se retrouver dans une chambre d’hôtel ou de motel et Ovono n’avait plus fait allusion au sexe. Ils entretenaient une relation plutôt bon enfant. Et Eyui ne manquait pas de le dire à Mengue qui demeurait méfiante. Mais un jour Ovono annonça à Eyui qu’il avait reçu un ordre de mission qui l’envoyait dans une agence de l’intérieur du pays. Ladite mission pouvait tenir sur plusieurs mois. Ce qui supposait qu’ils allaient se séparer pendant tout ce temps. Cette nouvelle fendit le cœur d’Eyui. Au-delà de l’amour qu’elle avait pour lui, Ovono était l’une des rares personnes avec lesquelles elle entretenait des échanges réguliers à la capitale. Non seulement, les échanges étaient téléphoniques et épistolaires, ils se voyaient également. Cela rendait sa vie moins monotone. Mais nul n’avait la capacité de changer quoi que ce soit à cette situation. Ovono lui avoua qu’il serait content de la recevoir à son lieu d’affectation temporaire si seulement Eyui était disponible. Malheureusement, le calendrier académique ne lui permettait pas de faire un tel voyage. Elle devrait donc attendre son retour pour qu’ils puissent se voir à nouveau.

 

En attendant, Ovono connaissait maintenant la date de son départ. Il devait voyager un samedi matin. La veille, il téléphona à Eyui afin de se donner rendez-vous. Bien que ravie, Eyui n’était pas trop en cline à la jovialité. Un au revoir n’est jamais sujet à de l’enthousiasme. Toutefois, elle se hâta de répondre positivement à la proposition d’Ovono. D’ailleurs, elle estimait que cet homme lui faisait honneur en lui accordant son dernier soir à la capitale. Cela n’arrive pas tous les jours de bénéficier d’autant d’égards. Alors à l’heure du rendez-vous, Ovono n’eut pas le temps d’appeler Eyui, cette dernière était déjà debout au carrefour où c’est lui qui l’attendait d’habitude. Les choses avaient bien changé. Une fois dans le véhicule, Eyui dit à Ovono qu’elle n’avait pas envie d’aller dans un endroit où il y avait des gens et encore moins dans une chambre d’hôtel. Elle souhaitait qu’ils passassent un maximum de temps ensemble. C’était leur dernière soirée avant un long moment et personne ne devait s’interposer entre eux. Alors Ovono lui proposa qu’il allât prendre de quoi manger dans un fast-food et de trouver un endroit tranquille pour discuter tout en grignotant, car Ovono avait eu une rude journée de travail et il était à jeun. Eyui accepta cette proposition. Alors, ils roulèrent vers un établissement qui vendait du poulet pané. Ils n’eurent pas le temps de descendre. Une fois qu’on les servit, ils se dirigèrent vers le bord de mer. À cette heure de la nuit, l’endroit était calme et le vent marin venait rafraîchir ceux qui s’y trouvaient. Curieusement, quand ils y arrivèrent, la plage était déserte. Or cet endroit était parfois clairsemé de couples qui venaient y passer de doux instants. Mais avec la hausse de l’insécurité, les gens prenaient de moins en moins le risque de s’y promener à la tombée de la nuit. Bien que conscient de la mauvaise réputation d’où ils étaient, Ovono s’y gara tout de même. Chacun était assis dans son siège. Ils commencèrent à discuter tout en mangeant ce qu’ils avaient pris au fast-food. Ils parlaient de tout et de rien. Ovono s’intéressait à la scolarité d’Eyui, si elle n’avait pas de difficulté particulière. Quant à Eyui, elle voulait savoir si Ovono avait une quelconque connaissance de la ville dans laquelle il allait bientôt passer plusieurs mois. Au bout de quelques heures de discussions, sans savoir comment, ils se retrouvèrent à parler des sentiments de l’un pour l’autre. Comme à la coutume, Ovono ne tarissait pas d’éloges pour la jeune dame. Il savait que cela la déstabilisait. Si le teint d’Eyui avait été plus clair, cette dernière aurait rougi. En tous les cas, elle semblait perdre ses facultés cognitives. Ses yeux luisaient comme ceux d’un félin dans le noir. Elle s’abreuvait des mots d’Ovono. Elle en voulait plus. Soudain, Ovono démarra le véhicule et il alla stationner un peu plus dans la pénombre. Maintenant, Ovono accompagnait ses mots avec des attouchements. Eyui ne lui opposait aucune résistance. Cela dit, les mains d’Ovono n’exploraient pas encore une partie érogène de l’anatomie d’Eyui. Il se contentait de lui caresser le cou, la nuque, les joues et parfois de faire passer ses doigts dans ses cheveux. Eyui semblait apprécier ce qu’on lui faisait. Puis Ovono entreprit de l’embrasser. Elle se laissa emporter par la fulgurance du baiser. Elle ressentit comme une décharge d’électricité sur tout son corps. Se sentant inconfortable à l’avant du véhicule, Ovono l’invita à prendre place sur la banquette arrière. À peine avaient-ils fermé les portières que les deux corps se fusionnèrent à nouveau en enclenchant une sorte de valse assise. L’inexpérience qui l’avait inhibée Eyui dans la chambre du motel semblait avoir pris la clé des champs. La fille de Melenga et Evouna donnait l’impression de maîtriser son sujet. Soudainement, de grosses gouttes de pluie commencèrent à tomber sur le toit de la voiture, cela ne semblait pas poser de problèmes au couple. À la différence de la dernière fois, ce soir-là, les choses prirent une tournure plus poussée. Au lieu de se contenter des baisers et de quelques attouchements suggestifs, Ovono entreprit de percer l’hymen d’Eyui. Comme anesthésiée par le plaisir, elle ne ressentit presque pas la douleur de sa défloraison. C’était un instant particulier et elle le vivait avec une personne particulière pour elle. Eyui à Ovono offrit sa fleur en guise d’amour. Elle ne voulait pas gâcher ce moment avec des plaintes. Elle désirait que cela soit inoubliable et que cela ne soit pas un souvenir douloureux qu’elle n’aurait plus envie d’évoquer. En tous les cas, tout se passait comme elle l’avait toujours rêvé. Elle était dans les bras de l’homme qu’elle aimait. C’était, certes son premier amour, mais pour elle, il était celui qui méritait plus que tout autre de recevoir ce précieux trésor. Eyui était au septième ciel. Elle qui était longtemps demeurée chaste, elle vivait l’épiphanie d’un plaisir qu’elle avait souvent craint. Quant à Ovono, il exprimait bonnement son exaltation. D’ailleurs, quand vint la félicité de leurs ébats amoureux, il n’eut pas le temps de pratiquer le coït interrompu. L’instant était si agréable qu’il ne voulut pas se retirer de la jeune dame. Il eut donc une éjaculation in utero, car il n’avait pas de préservatif avec lui. Il n’avait pas eu le temps d’en acheter et il ne s’était jamais imaginé que les choses allaient évoluer dans ce sens cette nuit. Qu’importe, l’heure n’était pas à ce type de réflexion. Mais une fois qu’ils revinrent en eux, il s’assura de demander à Eyui la date de ses dernières règles. Elle était évasive dans sa réponse. Il faut avouer qu’une femme qui n’a pas d’activité sexuelle régulière fait très peu attention à ces choses. Et nul n’eut l’idée d’acheter la pilule du lendemain. Le vin était tiré, il fallait le boire. 

Ils mirent encore quelques longues minutes, garées au même endroit, dans l’espoir que cesse la pluie. Quand cela arriva, l’horloge avait bien tourné. Il était trois heures du matin. Ovono démarra le véhicule afin de ramener Eyui chez elle. La ville était déjà déserte. Seuls quelques badauds, parfois avinés, traînaient devant les établissements de nuit. Au vu de l’heure avancée, Ovono n’allait pas prendre le risque de débarquer Eyui au carrefour comme c’était souvent le cas. Cette nuit, Ovono la raccompagna jusqu’à la porte de son domicile. Une fois sur place, Eyui appela Mengue pour qu’elle vienne lui ouvrir la porte. Avant que la colocataire arrive, Ovono profita à embrasser langoureusement Eyui une dernière fois. Il s’interrompit lorsqu’il entendit la clé tourner dans la serrure. Mengue ouvrit la porte et salua Ovono d’un bonsoir dénué de chaleur humaine. Celui-ci répondit et Eyui renchérit en les présentant mutuellement. Ovono s’excusa de leur fausser compagnie en arguant la profondeur de la nuit et en promettant de revoir les deux demoiselles dans des conditions idoines. Alors, il s’en alla jusqu’à son véhicule sans croiser le moindre individu. Quant aux deux amies, elles attendirent le matin afin de parler de la soirée d’Eyui. 

 

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